La tentative de coup d’Etat militaire en Turquie a avorté, à l’issue d’une nuit complètement folle. Les putschistes, des militaires constitués en un « Conseil de Paix Nationale » disposaient d’un certain nombre d’avions et d’hélicoptères militaires qui ont survolé Ankara et Istanbul à basse altitude toute la nuit, se sont emparés temporairement de la Télévision publique, ont investi les locaux de CNN, bouclé le siège de l’Etat-Major des Armées en prenant Hulusi Akar et le chef d’Etat-major et un certain nombre de haut-gradés en otage, bloqué la circulation sur un certain nombre de points stratégiques à l’aide de blindés et de troupes, parmi lesquels les ponts sur le Bosphore et les aéroports, bombardé l’Assemblée nationale semble-t-il à quatre reprises, pris d’assaut les bâtiments militaires et politiques stratégiques d’Ankara, parmi lesquels le siège des Services Secret et des Force Spéciales. Le Conseil de Paix Nationale a déclaré s’être emparé de l’ensemble des pouvoirs en Turquie, par la voix de la présentatrice de la chaîne publique TRT. Après un moment de flottement, les responsables de l’Etat ont annoncé qu’ils refusaient ce coup d’Etat et appelaient la population à sortir dans les rues, investir les places publiques et s’opposer aux militaires. Les forces de police, fidèles au gouvernement, ont combattu les forces putschistes à de nombreux endroits. Erdogan s’est quant à lui fendu d’une déclaration indiquant qu’il s’agissait d’une tentative de coup de force et que les responsables en subiraient les conséquences, avant de grimper dans l’avion présidentiel et d’atterrir quelques heures plus tard. Le palais présidentiel et l’hôtel Marmaris où celui-ci a tenu un point presse après son retour à Istanbul ont été attaqués par les militaires, sans dommage pour ce dernier. L’ensemble des forces politiques s’est élevée contre ce coup de force, et une partie des députés à investi l’Assemblée Nationale pour protester et tenir les lieux. Partout dans le pays des partisans du gouvernement sont sortis dans les rues pour occuper l’espace public et réinvestir les bâtiments ou points tenus par les putschistes, au prix parfois de nombreux morts. Le bilan actuel, provisoire, annonce 90 morts et 154 blessés. Il paraît infiniment probable que le bilan définitif se révèle être beaucoup plus lourd. On sait qu’un certain nombre d’aéronefs contrôlés par les putschistes ont été abattus par les F16 de l’armée restée loyale au gouvernement. Partout dans les grandes villes, on a pu assister à des scènes d’arrestation de militaires putschistes par les forces de sécurité, et probablement un certain nombre de militants du régime. On annonce actuellement quelques 1400 arrestations dans tout le pays. Le gouvernement, qui point du doigt la « Structure parallèle », à savoir l’organisation de Fethüllah Gülen, semble être parvenu à récupérer les manettes et les déclarations belliqueuses, vengeresses ou triomphantes se multiplient à mesure que l’échec de la tentative du coup d’Etat se fait du plus en plus patent. L’AKP sort renforcé de cette nuit incroyable, en apparaissant une fois de plus comme un défenseur de la démocratie et du peuple, alors même qu’il ne cesse de fouler cette démocratie au pied depuis plusieurs années. Les théories d’un coup d’Etat monté de toute pièce par l’AKP pour renforcer son pouvoir se multiplient chez les opposants ; autant dire d’emblée que cette hypothèse est parfaitement farfelue.
LE FIL DES EVENEMENTS AU COUR DE LA NUIT
TENTATIVE DE COUP D’ETAT EN TURQUIE.
Des militaires ont coupé l’accès aux ponts du Bosphore à Istanbul, peut-être bientôt à l’aéroport, des avions de chasse survolent Ankara, des combats ont eu lieu, apparemment, au niveau du siège du MIT (services secrets) et de logements militaires. Le Premier-ministre, Binali Yildirim a déclaré que tout ce qui sera nécessaire sera fait pour réprimer cette tentative et que le recours à la force a été autorisé.
Erdogan : Il s’agit bel et bien d’une tentative d’une minorité au sein des forces armées. Il s’agit d’un mouvement téléguidé par la structure parallèle (Ndt : comprendre, les Gülénistes). Les mesures nécessaires seront prises à l’encontre de ce mouvement qui s’en prend à la concorde nationale. Pour s’en être pris au pays avec les moyens de la nation, avec des tanks, des hélicoptères, ils en paieront le prix. Nous surmonterons cela en restant droit dans nos bottes. Quel qu’en soit le prix, nous ne nous laisserons pas faire. Je suis certain que cette invasion sera repoussée très rapidement. Qu’ils ne mettent pas notre résolution à l’épreuve.
J’invite l’ensemble de la population à sortir et à se rassembler sur les places publiques, et qu’ils fassent ce qu’ils veulent avec leurs tanks et leurs obus. Je n’ai jamais reconnu d’autorité supérieure à celle du peuple, et je ne vais pas commencer aujourd’hui.
La chaine de commandement a été complètement suspendue. (…). En temps que président, je suis le chef des forces armées. Ce mouvement dont je n’ai pas eu la connaissance en tant que chef des armées relève de la justice qui fera le nécessaire incessamment sous peu.
Journaliste : on prétend que le chef d’Etat-major est retenu en otage…
Erdogan : oui, j’ai moi aussi entendu la même chose, mais je ne sais pas à quel point cette information est fiable. Les choses sont troubles durant ce type d’évènements. Ils en payeront le prix, je peux vous affirmer cela.
(Ndt : comme les déclarations sont transcrites un peu n’importe comment par les journalistes, pour le moment, c’est de l’a peu près…)
Devletine milletine sahip çık
Recep Tayyip Erdoğan »